[FINISH] Tiens donc, ainsi nous nous retrouvons encore... [Feat Foudryy]

C'était un beau jour… Fin de journée. Le matou s'était mis en tête de retrouver Coeur de Jais, le matou du clan de la rivière devenu son espion. Jusqu'à présent le petit félin noir lui avait obéi, faisant bien son boulot quoique restant un peu sur la réserve. Il avait peur. Peur pour lui. Peur pour ses amis. Et c'est cette peur qui l'obligeait à fouiner, une peur partout dans le but de satisfaire le cruel solitaire. De son côté, le matou tenait parole et ne causa aucun ennui à un membre du clan de la rivière, n'allant sur leur terre que pour prendre des nouvelles de l'espion.

Parallèlement, il avait pris l'habitude de discuter avec Opale lui aussi du clan de la rivière mais pour apaiser le guerrier tacheté, il ne s'était vu qu'en terre libre et c'était mieux ainsi. Il savait pertinemment que sa loyauté allait à son clan et qu'il serait surement contraint de le chasser s'il se voyait. Mais ça n'arriverait pas. Opale n'avait aucune raison de se trouver là, alors même qu'il attendait un rapport détailler sur les dernières nouvelles claniques. La maladie est de plus en plus féroce et personne ne semble avoir le moyen de la contré.

Il soupira, assis sagement perdu dans ses pensées, son regard s'arrêtant sur la neige et la glace. Un territoire bien particulier ou l'eau s'était figé par endroit. Il fut ainsi, happer dans ses pensées les plus profonde, la queue enroulée autour de ses pattes. C'est peut-être ce qui fit qu'il ne l'entendit pas. Il en sursauta presque même, mais il ne s'agissait pas de la voix pleurnicharde de Coeur de Jais.

-Foudre ?

Il observa Opale, hébété, comme si c'était la première fois qu'il le voyait. Il appréciait bien Opale, sa compagnie lui avait été toujours agréable mais en cet instant, il ne voulait surtout pas le voir, pas ici, quelle galère. Foudre le détailla comme si au fond il espérait que ce n'était pas Opale, pourtant, il avait bien dit son nom. De cette intonation agréable et douce qui avait le don d'apaiser. Mais là, il n'était pas du tout apaisé mais plutôt paniqué. Il n'en laissa rien paraitre, réfléchissant surement à un mensonge qui puisse passer sans problème.

- H-hey..! Opale! Ca me fais plaisir de te voir! Tu me manquais alors je suis venu à ta rencontre! Ironisa t-il. L'humour passait souvent bien. Mais Opale n'était surement pas dupe, il devrait probablement se justifier mieux que ça.

La situation semblait plus tendu qu'en terre libre. Après tout, leur lien était différent ici. Il devenait un ennemi et une potentielle menace. Il n'aurait jamais dû se voir ici. Il aurait dû voir Coeur de jais puis s'en aller comme si de rien était. Opale semblait se méfier. Ses paroles ironiques avaient évidemment pas été pris au sérieux, peut-être parce qu'en ce moment précis, le fourbe solitaire eu l'impression d'être incapable de mentir correctement.

Après de longues secondes qui lui parurent être tout bonnement une éternité, le matou le rejoignit, Foudre pivota ses oreilles, légèrement crispé, ça ne lui ressemblait pas. Il s'attendait à une attaque, qu'Opale s'énerve mais ce dernier ayant le caractère le plus calme du monde se contenta de le rejoindre simplement, faisant bien attention où il mettait les pattes. Foudre le toisa en silence ne pouvant qu'éprouver une certaine culpabilité. Il ne se sentait pas lui. Il se sentait trop faible pour être lui. Où est donc passé Satan qui semblait avoir quitté son cœur pour l'observer d'ailleurs ?

- Moi aussi je suis content de te voir. Mais que fais-tu vraiment là ? C'est le territoire de la rivière ici, je devrais te chasser... Tu sais ? Tu ne viendrais pas pour moi.

Il avait soupiré, posant son museau sur son épaule pour le saluer comme deux amis. Mais il n'était pas amis. Quel ami serait capable de tels atrocités envers un membre du clan du guerrier ? Peut-être un ami ? Un confident ? Un frère ? Peut-être était-il en train de faire souffrir un proche d'Opale… Secrètement, Foudre espéra que Coeur de Jais soit l'ennemi du guerrier. Il n'aurait que moins de remord comme ça… Mais vu le caractère des deux matous, cela semblait impossible, il fallait être réaliste.

- Allons, allons Opale, pour toi je traverserais les quatre territoires sous une tempête de neige en une seule journée s'il le fallait! Ronronna le matou avec amusement.

Il avait continué avec le même ton joueur mais pas vraiment sincère. Un ton qu'il avait si peu pris avec le guerrier, jusque-là. Peut-être était-ce pour gagner du temps ? Peut-être avait-il réellement peur de la réaction du guerrier s'il apprenait la raison pour laquelle il se montrait si clément avec le clan de la rivière… A son plus grand étonnement, Opale n'en avait jamais demandé la raison. Mais pour eux deux, s'étaient mieux qu'il ne la connaisse jamais. D'un geste furtif, après le "salut" du clanique, Foudre releva légèrement la tête pour lui effleurer le museau, l'œil brillant, provocateur, il déclara sur le même ton "faux" mais sans aucune méchanceté, cherchant juste un moyen d'éviter la vraie raison de sa venue :

- Et bien, cher Opale, chasse-moi si tel est ton désir, je ne m'y opposerai pas et ne résisterai pas.

Foudre savait pertinemment que ce mensonge était trop gros pour passer par-dessus le guerrier. Surtout Opale. Il en fallait surement beaucoup plus pour le tromper, malgré que ce dernier n'en dirait pas forcément quelque chose… Mais cela se sentait. Et Foudre se maudissait d'avoir menti si mal alors que d'ordinaire, il ne s'agissait que d'une formalité. Il-se-détestait. Ne se reconnaissait plus. Ou alors c'était simplement le vrai Foudre qui parlait ? Peut-être qu'à force, il ne savait plus vraiment qui était le vrai lui.

Foudre continua d'observer le matou. Il ne semblait pas en colère. Remarque, Opale en colère, il ne verrait jamais ça. Cette idée le fit doucement sourire. Ce matou-là était bien trop gentil. Lui qui trouvait la gentillesse à vomir, cela ne lui fit pas cet effet-là. Malgré tout, il continuait de craindre sa réaction le jour où il apprendrait son double jeu. La véritable raison qui le poussait à laisser le clan de la rivière tranquille. L'envie de lui demander s'il connaissait bien Coeur de Jais lui brûlait les lèvres, mais il n'osa pas en parler. Aujourd'hui pour surement la première fois de son existence, il ne se sentit pas courageux du tout.

-Tu sais bien que je suis incapable de faire ça. Vois-tu, je ne peux pas vraiment bouger pour l'instant, alors autant discuter un peu. Qui traînerait ici à cette heure-ci ?

Foudre espérait qu'il avait raison. Enfin… Il avait quand même peur de voir Coeur de Jais débarquer en pleurnichant que Foudre était un dangereux criminel. Jusqu'à présent, il ne l'avait pas senti. Peut-être ne viendrait-il pas, après tout. Il se détendit, amusé par l'honnêteté du matou et son extrême bonté envers lui, si mesquin… cette relation amicale le rongeait. Pour le bien d'Opale, il devait y mettre un terme. Mais il n'y arrivait pas.

-Haha et bien tant mieux tu sais. J'ai cru que tu étais enfin venu te charger du clan de la rivière.

Cette phrase qui sonnait tant comme une boutade était pourtant tout autre… Foudre ne sut d'abord que répondre. Devenir l'ennemi d'Opale. Il n'en avait pas envie… Il s'était promis de se fermer à l'amour pour ne pas s'écarter de la vengeance qu'il souhait et n'avait pas vu les autres relations qui pouvaient se créer. Il s'était fait avoir, comme un amateur, ça le répugnait. Si seulement il avait connu Opale avant… il aurait trouvé une autre victime, d'un autre clan et ne se sentirait pas ronger par cette drôle de culpabilité jamais ressenti avant.

- J'ai bien peur que l'on devienne ennemi avant cela.Marmotta le solitaire.

Il s'ébroua, il ne savait pas si Opale l'avait entendu. Peu importe, il aurait dû se taire, il ne se répèterait pas. Tôt ou tard tout ce saurait, ses sombres machinations. Ce qu'il faisait à Coeur de Jais. Le triste sort qu'il avait réservé à Envol du Corbeau, la violence dont il avait fait preuve face à la lieutenante du clan du tonnerre, la manipulation cruelle dont il avait fait preuve face à Feuille de Trèfle qui pensait enfin être compris… et d'autre encore, tout finirait par ce savoir. Et alors que tout le monde se mettait à craindre le solitaire, Opale sentait son affection ce renforcé et inversement. Le choc serait forcément violent dans les deux sens. Les yeux réduits à deux fentes, Foudre poussa un profond soupire, se rapprochant du guerrier, se collant presque à lui, il vint lui murmurer.

- Satan ne peut être arrêté par n'importe qui, si un jour je venais à faire des choses inimaginables par la simple volonté des démons, alors, je veux que tu m'achèves, je saurai au moins, que si c'est toi, je ne me débattrai pas.

Foudre le vit. Avant même que l'autre ne réponde. Sa réponse semblait évidente. Il ne pouvait accepter sa requête… Il serra les crocs "tu ne peux pas me refuser ça… tu ignores ce que j'ai fait…" Pendant un instant, il voulut tout lui balancer. Ce qu'il avait fait. Les meurtres. Les viols. La manipulation. Ses objectifs. Mais tout serait ruiner s'il le disait. Tous ses buts. Mais sa relations surement amical(?) avec Opale serait également anéantis. Alors il se ravisa. Se murant dans son mutisme. Il se sentait détestable. Mais c'est exactement ce qu'il était.

Il sentit la colère d'Opale, lui, si calme. Il était tendu. Il devait trouver ça si injuste. Mais Foudre voulait qu'il retienne sa demande. Sinon… sinon il finirait par souffrir. Il allait blesser Opale. Il le savait. Il l'avait déjà blessé sans que celui-ci ne le sache et tout ne ferait que s'aggraver. Encore. Encore. Le jour viendra où ils seront définitivement ennemis et où Opale changera d'avis. Il devrait le tuer.

-Je ne serais jamais comme mon père, Foudre. Je ne tuerais pas. Si je dois t'arrêter, je le ferais, mais pas comme ça. Fais-moi confiance.

Foudre secoua lentement la tête. "Pour protéger ton clan, ce sera différent". Opale avait vaguement parlé de son père lors de leur rencontre mais il ne donnait que peu de détail, comme si ce n'était rien de bien important et Foudre n'avait pas vraiment osé demander des précisions. Il savait juste que c'était lui qui avait fauté en fréquentant une solitaire et que par la suite, il avait très mal agi notamment avec la mère adoptive d'Opale. Mais là, ce ne serait pas pareil. Le guerrier devrait le faire pas par égoïsme mais pour protéger son clan, ses amis, sa famille.

-Foudre. Je sais en quoi tu crois et je comprends. Mais pourquoi te laisser posséder par tes démons ? Tu es plus que cela, qu'en penses-tu ?

Le matou ouvrit les yeux, perdus, comme s'il ne savait pas ce qu'il faisait là. Lutter contre Satan ? Lutter pour changer de destin… ne pas suivre celui tracer pour lui et devenir quelqu'un d'autre que Hati… Au fond, sa vie se résumait à cela, servir d'hôte pour Satan de son vivant, et suivre une tournée tracée pour lui à sa mort. Au final, il n'aurait jamais été libre. Opale restait prêt de lui, comme pour le rassurer mais cette proximité et cette gentillesse, il n'en voulait pas… ce ne serait que plus dur le jour où la vérité à son sujet éclaterait au grand jour…

- Plus je lutte, plus je m'enfonce… j'ai arrêté depuis longtemps, cette force, je ne l'ai pas.

Il referma les yeux. Il avait horreur de dévoiler ces faiblesses. Et clairement il le lui avait dit, il n'était pas assez fort. C'était un peu comme… si Opale avait voulu se détourner de tous ses ancêtres en les défiant ouvertement. Il ne pouvait pas faire ça. Il poussa un profond soupire. Réfléchissant à sa première question. Comment le convaincre que c'était la chose à faire ? Il plongea sa tête dans la fourrure du matou tacheté, surement parce qu'en cet instant, il fut incapable de le regarder dans les yeux.

- Tu as une compagne, Opale ? Un ami proche ? Quelqu'un qui t'es réellement cher ? Surement que oui, tu n'es pas un ermite à ce point,petit rire après sa petite blague, il reprit avec sérieux, C'est pour cela que tu feras ce que je te dis.

Opale s'était détendu et rit à son tour. Il ne voulait juste pas comprendre. Il n'était celui qu'il pensait être. Il voulait lui demander s'il connaissait Coeur de Jais mais encore une fois, les mots restaient bloqués dans sa gorge. Comme un secret inavouable. Il entendait la voix ravi d'Inferno à son oreille "C'est bien, Foudre! Maintenant tu peux faire n'importe quoi au clan de la rivière, ce pitoyable guerrier ne pourra rien te faire!" Mais était-ce vraiment ce qu'il avait cherché ? Le manipuler pour n'avoir plus rien à craindre de lui ? Non. Sinon il ne lui aurait jamais demandé de le tuer. Ou essayait-il de le tester ? Ses propres pensées s'embrouillaient, comme s'il ignorait s'il avait agi de sa propre volonté.

Il cligna des yeux. Ça devenait trop dur pour lui. D'avoir pu berner si simplement le guerrier. Il ne pensait pas qu'il était naïf à ce point… il avait vu des chats vraiment tous innocents qu'il avait pu manipuler à sa guise, comme les deux frères Feuilles de Trèfles et Feu Follet, deux félins tout à fait touchants et qui l'avait aidé peu importe qui il était. Un instant, un étrange élan de lucidité lui parvint dans son cerveau dérangé. Et si ce n'était pas de la simple naïveté stupide mais bien une simple gentillesse profonde dont certain était capable ? Et s’il s'agissait de lui qui se faisait manipuler au point d'éprouver des remords ?

-Ho Foudre. Tu me vois avoir une compagne ? Il marqua une pause. Bien sûr je tiens à mon clan. Bien sûr, j’ai des amis et des gens que j’aime… Mais qui t’as dit que tu n’en faisais pas parti ?

Il lui toucha la joue de son museau. Non. Il ne pouvait pas en faire partie. La vie d'Opale, la personne avec qui il prenait plaisir à discuter de tout et de rien ne pouvait lui être ouverte. Ce n'était qu'une illusion de voir cela ainsi. Il ignorait si c'était lui ou Opale qui se voilait le plus la face. Lui pour avoir espéré continuer de passer des moments simple et agréable et Opale d'avoir pensé sauver Foudre. Et c'est peut-être ces pensées-là qui l'avait forcé à fermer les yeux sur des doutes que le guerrier devait forcément avoir...

-Tu es plus fort que tu ne le penses, Foudre. Regarde, tu doutes. Douter est une force en soi. Maintenant c’est à toi de voir ce qui est le mieux pour toi. Et c’est à toi de choisir.

Il secoua lentement la tête. Faux… tellement faux… il n'y avait plus rien à sauver, tôt ou tard, Opale devrait le tuer, il était le seul à pouvoir le faire, contre qui il ne lutterait pas, contre qui la défaite lui paraissait comme une libération… Même si une telle demande était égoïste, qu'importait si ça lui permettrait de sauver les vraies personnes qu'il aimait. Il n'était rien pour lui et inversement. Ils ne seraient jamais rien l'un pour l'autre. Il devrait s'y faire. Bientôt, il se débarrasserait de Coeur de Jais sans la moindre pitié et ce ne serait pas le seul. Et Opale se réveillerait et enfin, il regretterait de ne pas avoir ouvert la gorge du solitaire alors que son cou était si proche et accessible de lui. Il comprendrait son erreur mais si cela prendrait du temps.

- Viendra le jour où tu regretteras de te voiler pareillement la face.Gronda t-il.

Il se rapprocha du guerrier pour plonger son museau dans sa fourrure. Ce geste affectueux qui faisait si facilement baisser sa garde au guerrier lui permis sans la moindre difficulté de lui donner un coup de patte et de balancer son poids contre le flanc de l'autre pour le renverser. La facilité avec lequel Opale se retrouva à terre était déconcertant. Il n'y avait là une technique particulière qu'il avait utilisé pour parvenir à ses fins. Juste la simple faiblesse d'oser lui faire confiance. Il l'avait plaqué au sol, le fixant d'en haut, les griffes rentrées avec un sourire presque triste. Il se pencha vers lui.

- Le jour où tu te rendras compte que tu ne pourras plus rien pour moi, fais la même chose et met un terme à tout ça.

Il lui donna un coup de langue discret sur son museau avant de s'écarter sans un mot. Il fixa le ciel en espérant que Hati lui dise quoi faire mais rien. Il soupira, frustré, n'osant regarder Opale en face puis il minauda un "Adieu" si bas qu'il aurait été impossible pour Opale de l'entendre. Sans le moindre regard en arrière, il s'en alla dans les bois, happer par les ténèbres de la nuit.